mardi 13 novembre 2007

Lettre E - Estelle - (3/3)

Le taxi s'arrête quelques rues plus loin et Estelle descend acheter de l'aspirine à une pharmacie. Le chauffeur ne l'attends pas. Elle en hèle un autre et cette fois s'efforce de ne pas vomir.

Une fois chez elle, elle se couche et n'ose pas regarder le massacre de son corps.

Il lui semble qu'elle ne tiendra pas la journée. Autour d'elle, tout est changé. Elle voit le monde à travers le voile que la douleur a jeté sur son corps. Elle a presque du mal à reconnaître sa chambre et, sur la table de chevet, le portrait de Thierry, qui, aux tables des restaurants, lui vantai si souvent la poitrine des autres femmes.

Avant de s'effondrer, elle a la force de prendre le combiné du téléphone. Il lui semble que tout tourne autour d'elle. Une voix lui parle, mais elle est incapable de répondre.

La chambre d'hôpital est blanche et sa fenêtre donne sur une petite cour dans laquelle des malades se promènent en compagnie de leurs familles. Les murs de la chambre d'Estelle vient d'être repeinte et les murs sont d'une blancheur que l'oeil a du mal à soutenir. Les pansements autour de la poitrine d'Estelle forment comme une seconde peau. Elle ferme les yeux. Elle rêve un instant et sent de nouveau le tissus rêche des pansements sous ses doigts. Alors elle pleure et des larmes viennent doucement naître au coin de ses paupières.

Deux infirmières discutent dans le couloir devant la chambre d'Estelle. L'une d'elle porte, sur un plateau argenté, les anciens pansements d'Estelle. L'infirmière les change deux fois par jour. L'opération, à chaque fois, prend bien une heure.

- Horrible, dit-elle.
- Oui, répond l'autre. Il paraît.

Un journal froissé repose sur une chaise : en gros titre "Un ancien infirmier arrêté pour exercice illégal de la médecine".