dimanche 10 juin 2007

Lettre A - Antoinette - (part 2/2)

La voix de Marie crépite à nouveau dans le combiné du téléphone et puis la jeune fille raccroche. Antoinette écoute la sonnerie sans penser à rien. Dans son magasine, il y a un article sur les feux des puits de pétrole pendant la dernière guerre d’Irak. C’est beaucoup plus intéressant que Marc qui vient d’entrer à Polytechnique. Elle repose le combiné sur la table. Elle ne veut plus être dérangée.

Elle entre dans la cuisine et se sert un verre d’eau. En bas, sur l’asphalte, elle voit les passants qui se bousculent devant la pharmacie. Ils ont l’air gêné des employés qui ne veulent pas gâcher leurs vacances. Les Tour Operators n’ont prévu personne. Le Louvre est désert, le système de climatisation est en panne. La Joconde, pour la première fois de sa carrière, profite des grandes vacances.

Antoinette se dirige vers la salle de bain. Elle entend le téléphone. Elle s’arrête un instant. Non, elle ne veut voir personne. La solitude est la plus douce des compagnes. Le téléphone ne cesse de sonner. On entend des cris dans la rue. Antoinette ne regarde pas par la fenêtre. Au fond, elle méprise cette foule victime de la chaleur. Elle reste éloignée de tout, seule dans la fraîcheur de son grand appartement. Comme elle entend des cris qui viennent de la rue, elle ferme la porte de la salle de bain.

L’eau coule sur son corps. Antoinette frissonne sous sa caresse glacée. Elle regarde l’eau qui file sur ses jambes en longues rigoles. Le fond de la baignoire se remplit. Antoinette se met à lire son magasine.

Une heure passe. Il y a des cris dans la rue.

Antoinette croit entendre une sirène. Mais elle est dans un demi-sommeil. Et puis, a-t-on vraiment besoin des pompiers dans ce Paris ravagé par l’incendie du mois d’août ?

Il fait de plus en plus chaud.

Antoinette n’y tient plus. Elle vide l’eau de son bain. La fraîcheur de l’eau de la douche calme à peine la chaleur qui règne dans la pièce. Une odeur étrange monte aux narines de la jeune fille. Elle met son peignoir et ouvre la porte.

Elle reste muette face aux flammes qui, en un instant, se sont engouffrées dans la salle de bain. Antoinette danse, et les brûlures sont rendues plus douloureuses encore car son peignoir de Lycra fond sur elle. Elle a brûlé très vite, dans l’ensemble.

Le rapport de police indique que le feu est né dans l’appartement des parents d’Antoinette.

Au 4ième étage, on a sauvé une commode Louis XV.